Du
26 octobre au 5 novembre 2004, je suis allé au Burkina Faso. Je vous invite à
me vivre. Pour faire bref, je reprends ici le mail que j'ai écrit au retour en
l'agrémentant de quelques photos du
« pays des hommes intègres ». Depuis Thomas Sankara en 1980, le
pays de Haute-Volta (des trois rivières Volta, la rouge, la noire et la verte)
s’appelle ainsi. C’était avant tout le voyage des retrouvailles avec
d’anciens gabonais. D’abord Alain et Fany à Bobo Dioulasso (anciennement
nommé Sia) que je rejoignais après 5 heures 30 de car par une route plus ou
moins bonne qu’emprunteront la semaine suivante les coureurs cyclistes du Tour
du Faso que nous croiserons lors de la remontée vers la capitale. Il y avait même
l’inénarable Gérard Holtz… Revenons d’abord à nos moutons. Arrivée
sans histoire à Bobo, au revoir à Jossélyne (rencontre 1) qui m’accompagna
durant tout le voyage, me fit goûter au poulet frit de Boromo, lieu d'arrêt du
car en plein milieu du parcours, et me commenta son pays. Je ne l’ai pas revu
ensuite, dommage. Bonjour (ou plutôt bonsoir) à Alain et Fany venus me
chercher à l’arrivée, heureux tous les trois, nous étions. Ils m’ont vite
fait découvrir l’endroit où ils vivaient.
Le
marché de Bobo où l’on pourrait presque se perdre dans ce souk animé. Les
villages en case de banco, briques de boue et paille séchées.

Superbe région
dont les souvenirs les plus forts sont pour moi, les pics de Sindou, vaste
falaise découpée avec cheminées de fées, amoncellement de chaos basaltiques,
lieux sacrés, et parfois tabous aux étrangers, où nous déambulions sous la
chaleur en compagnie de notre guide, instituteur du village (rencontre 2) de son
état et qui rejoignent celle de
Badangiara au Mali, en pays Dogon visitée à Noël 2002, le marché de Banfora,
les pics de Sindou, vastes paysages escarpés dans lesquels nous nous sommes
promenés en compagnie de l'instituteur du village, les rizières et jardins qui mènent aux cascades de
Karfiguela. On entend dire
parfois que les africains ne travaillent pas ; je peux assurer que
j’ai vu des familles entières essayer d’arracher à la terre ou au ruisseau
de quoi s’alimenter : jeunes pêcheurs de grenouilles, femmes plantant
les arachides, hommes sarclant la terre avec le daba, houe à manche court…
pour le sorgho, récolte de maïs mis à sécher sur les arbres... La montée aux
chutes fût superbe, sous les arbres et les cascades de toute beauté. J’ai
aussi visité un jeune bronzier qui réalise avec son équipe, dans des
conditions d’extrême simplicité, des objets en bronze de toute beauté
(rencontre 3) ; je lui achèterai deux pièces de deux styles différents :
une grande femme stylisée un peu à la Giacometti et un joueur de balafon, plus traditionnel.
       
J’accélère
un peu mais ne peux éliminer le repas au resto un soir à l’Eau Vive :
excellent repas dans un jardin carré tenu et servi par des religieuses qui vers
10 h 30 ont arrêté le service pour chanter un ave maria… Visite au Musée de la
musique et des instruments traditionnels, petit mais bien conçu.
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Nous
sommes remontés ensemble à Ouagadougou, en 4x4 afin de retrouver d’abord
Mireille et son mari. Là encore un accueil chaleureux. Nous convenons de nous
revoir en fin de semaine car auparavant nous allons retrouver Samuel, Katia et
Zoé qui arrivent du Mali en voiture après 14 heures de route. Nous nous
louperons le premier soir, pressés que nous étions d’aller « dîner en
ville » et eux d’aller se reposer. Dès le lendemain, le contact est
passé et nous avons passé trois jours entre le SIAO,
vaste marché et foire internationale de l’artisanat africain où il y a de
tout, de l’objet traditionnel le plus rare, le plus artistique, le plus design à la
verroterie de marché ou aux objets bateaux,
les achats (presque frénétiques), et des ballades sympas autour de
Ouaga (parc aux crocos de Bazoulé…piège à touristes mais très
impressionnant). On s’est quitté un peu à la va vite, mais on sait qu’on
va se revoir, alors tout va bien…
     
Ouagadougou
est une ville dynamique, qui bouge et s’agrandit. Des échoppes partout, une
circulation dense de voitures, de taxis verts et de cyclomoteurs. Après le départ
des uns et des autres pour rentrer travailler car j’avais les vacances de
Toussaint les plus longues, Mireille prit le relais et venait me chercher chaque
matin au Pavillon vert, l’hôtel sympa où j’étais, pour m’emmener
visiter des galeries, des ateliers de fabrication et des lieux particuliers dans
la ville. La galerie Olorun est un endroit unique ou de jeunes créateurs
travaillent ensemble chacun dans une spécialité particulière (peinture, bois
sculpté, soudure, travail des calebasses, …). C’est là que Zaccharia
(rencontre 4) m’offrit après la
visite une de ses œuvres superbes en ocres, terres naturelles et pigments posés
avec précision et finesse uniquement avec les doigts. Puis nous irons aussi
dans un quartier lointain visiter l'association " les papiers du Sahel", lieu de formation
de
femmes par une ONG sur l’alimentation et aussi de fabrication de papier recyclé
de toute beauté, que Mireille utilise pour ses superbes tableaux stylisés.
Nous retournerons au Siao pour m’acheter trois petites toiles d’un peintre
de Bobo et un cadeau pour Zaccharia. Je visiterai encore un atelier de
fabrication de bronze et Ouaga 2000, la nouvelle cité résidentielle.
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Le
travail des bronziers requiert du doigté, de la patience et de la modestie.
Essayez d’imaginer les étapes… D’abord un artiste sculpte une pièce dans
la cire d’abeille avec tous les détails. Cette pièce est ensuite enveloppée
d’une double gangue de terre. Une fois séché, l’ensemble est mis au feu afin de faire fondre
la cire intérieure et obtenir ainsi un moule parfait. Fin de la première
partie. Dans un creuset lui-même placé dans un petit fourneau où un jeune
vient activer les braises avec un ventilateur actionné soit à la main soit
avec une roue de vélo, sont mis à fondre des robinets, des poignées de portes,
des tubes de cuivre, des matériaux de récupération… Inutile de préciser
la chaleur ambiante, la couleur verte des fumées et la sueur de celui qui
active le feu ! Quand la température atteint 1000° les matériaux sont
liquéfiés et la coulée du creuset est versée dans les pièces en terre, alignées
orifice en haut, les unes à côté des autres. Tout le monde travaille en
claquette… et on espère qu’aucun accident… Une fois refroidi, le moule
est cassé (pièce unique donc) et on découvre alors avec plaisir, comme
des enfants, si le métal a bien circulé dans les veines du réseau en terre,
une pièce terne mais en forme.
Il reste à poncer, limer, polir. Je vous montrerai le résultat magnifique.
     
Ouaga
2000 c’est bien autre chose. Il s’agit d’un immense quartier en chantier,
seuls les immenses boulevards sont terminés, où seront implanté palais présidentiels,
hôtels, salles de conférence, ministères, mémorial, demeures de riches édiles…
et devant accueillir le prochain sommet de la Francophonie. Devant l’aspect
grandiose de l’ensemble on ne peut que se demander comment l’un des pays les
plus pauvres de la planète (hors économie informelle très présente ici) peut
se permettre de voir aussi grand : part d’aide internationale créant des
emplois et surtout des retours de financement pour des entreprises françaises ou
autres, blanchiment d’argent (le Burkina est un pourvoyeur d’armes à la Côte
d’Ivoire, en guerre en ce moment ; l’Afrique repartirait-elle dans les
ténèbres d’où elle s’était à peine sortie - je ne dirai certainement
pas d’où on l’avait à peine sortie, tant elle subit encore les conséquences
des décolonisations)… Bref, j’ai eu le sentiment déplacé d’un autre
pays que celui que j’avais visité auparavant.
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Pour
conclure, je dirai que chaque voyage est encore un événement extraordinaire
pour moi, alors qu’il est de nos jours devenu tellement banal et banalisé…
J’ai aussi eu honte de touristes français, voisins de table de petit déjeuner
un matin à l’hôtel, certainement familles de militaires vu la coupe des
trois mecs et la taille de leur 4x4, effectuant des commentaires désobligeants
au personnel, ramenant tout à la France ci, la France ça, référence absolue
en savoir vivre et en comportement respectueux, c’est bien connu… supériorité
absolue, absolument conne oui…
Ps1.
Environnement musical que vous avez certainement perçu en lisant ces
lignes!!! : Otis Redding au
whisky à gogo, Jacques Brel, l’homme de la Mancha (rêver un impossible rêve),
Serge Regiani, voix mélange de force et de vulnérabilité, présence et émotion…
Ps2.
La bière burkinabè, la Brakina est fort bonne…
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